Les grands destins naissent souvent d'un hasard ou d'une lubie ; ce fut le cas pour la famille Cassegrain. Le père, Jean Cassegrain, tient alors une boutique idéalement située sur les Grands Boulevards, offrant aux fumeurs tous les accessoires leur étant nécessaires. En 1948, Monsieur Cassegrain a l'idée de gainer ses pipes de cuir. Est-ce parce que la qualité de ses bois laisse à désirer, ou est-ce une envie avant-gardiste 100% esthétique ? Personne ne l'a jamais su, mais ce qui est sûr, c'est que cette innovation remporta un franc succès, à tel point qu'il se voit dans la nécessité de créer une marque afin d'encadrer et de protéger son invention.
Ce sera "Longchamp", en référence à l'élégance de la faune huppée qui se presse sur le terrain de courses. Longchamp née donc en 1948, avec pour symbole un cheval au galop. La griffe devient rapidement synonyme de luxe et de raffinement. Les Cassegrain développent plusieurs gammes de produits toujours sur le même système de gainage, la petite maroquinerie devenant ainsi leur fer de lance.
L'Amérique, le Japon, et le Maroc succombent au charme raffiné de cette nouvelle marque dès les années 50. La demande est telle que Jean Cassegrain a la possibilité en 1960 d'ouvrir sa propre manufacture. Elle se situera dans le Maine et Loire, et fonctionnera selon les codes d'un artisanat de haute qualité : les opérations de finition sont réalisées à la main, les découpes sont extrêmement précises et tout est minutieusement observé puis modifié. De la routine des ouvrières au positionnement des machines, tout doit être optimal afin de pouvoir offrir aux clientes le meilleur rapport qualité/prix. C'est ainsi que les dirigeants de Longchamp - tout en garantissant une qualité irréprochable - mettent un point d'honneur à proposer une large gamme de prix, dont les premiers sont accessibles au grand public.
En plus d'être des hommes d'affaires avisés, les Cassegrain cultivent l'art de l'innovation. Ils sont curieux de tout et n'hésitent pas à tenter diverses expériences en matière de maroquinerie. C'est ainsi qu'en 1970, intrigués par le nylon des tapis utilisés par l'armée, ils décident de l'utiliser pour mettre au point une nouvelle gamme de bagagerie, à la fois élégante et ultra résistante. L'opération est un succès, et la griffe gagne en prestige. Dans ce contexte, le brin de folie visionnaire dont fit preuve le créateur de la griffe ne fit qu'accentuer la légende. En effet, après le nylon army, il décida d'installer certaines de ses boutiques dans les aéroports. Ce qui à l'époque paru complètement saugrenu s'impose à la lumière d'aujourd'hui comme une véritable idée de génie.
Libre de toute pression de par son indépendance (Longchamp est autonome vis-à-vis des grands groupes de luxe et n'est pas cotée en bourse), la griffe peut se permettre d'évoluer à son rythme et selon ses envies. Le cheval au galop - enseigne de la marque - semble avoir un caractère prémonitoire, car si la société dans les années 90 est au beau fixe, l'innovation dont elle va faire preuve va la propulser dans les étoiles.
En 1994, de retour d'un voyage au Japon, le fils Cassegrain, fasciné par les origamis, échafaude l'idée de concevoir un sac qui pourrait se plier comme une enveloppe : le Pliage est né. En nylon, décliné en duo de couleurs chic et classiques et en 5 tailles différentes, le Pliage - d'un prix accessible - séduit en masse : de la lycéenne bobo à la trentenaire classiquement mode, c'est un véritable raz de marée. En très peu de temps, le Pliage et Longchamp ne font plus qu'un.
Ce succès va offrir à la griffe une visibilité inattendue et une aura mode qui lui faisait défaut auparavant. Loin de se démoder, le Pliage est et reste le produit leader de Longchamp, les stylistes de la maison s'amusant à le décliner en plexiglas translucide, en en coloris tendance ou même en croco. Les clientes peuvent également personnaliser leur Pliage via le site internet de la marque. Basic d'entre les basics, ce sac est devenu un accessoire à part entière qui, même s'il fut maintes fois copié, n'en reste pas moins un élément phare de Longchamp, générant plus de 20 % de son chiffre d'affaires.
En parallèle, l'année 1994 va voir naître un autre petit nouveau chez Longchamp. C'est Isabelle Guyon, l'une des têtes pensantes du style de la griffe qui imaginera la gamme Roseau. Ces sacs sont un parfait exemple de la philosophie de la maison : réalisés en croûte de cuir par souci d'économie, ils font néanmoins preuve d'une certaine élégance, à la fois urbaine et distinguée, ce qui en fera un best-seller.
Petit à petit, Longchamp s'échappe des sentiers trop classiques. Les basics sont certes conservés, mais la direction artistique n'hésite plus à confier à des intervenants extérieurs le relooking saisonnier de certains modèles. Tracey Emin ou Thomas Heatherwick (a qui l'on doit le sac Zip) ou plus récemment "Me Compagny" (studio de design à l'origine de certaines pochettes de Björk) ont ainsi permis de booster l'image de la société.
Un des faits les plus marquants de ce changement de stratégie marketing est le choix de Kate Moss comme égérie. À la fois sensuelle, fraîche et coolisime, la brindille confère à Longchamp le zeste de branchitude qui lui manquait. Par ailleurs, lorsqu'en 2005 la belle est surprise le nez dans la poudre, Longchamp est l'un des seuls à ne pas lui tourner le dos et à renouveler son contrat. Cette liberté de choix leur est permise par la non-cotation de la société en bourse, liberté dont les enfants Cassegrain ne sont pas prêts à renoncer, car elle leur offre une grande marge de manœuvre qui n'a cessé d'être bénéfique durant ses 50 dernières années.
Loin des calculs à la LVMH, Longchamp et les Cassegrain perdurent grâce une gestion familiale soudée, à un développement maîtrisé à l'international, à un plébiscite constant de leur clientèle, à une Kate Moss qui parvient à faire du Legend un "it" en à peine deux apparitions, et à une dynamique d'innovation qui semble faire partie de leurs gènes...
Meme moi qui ne m'interesse absolument pas en temps normal à l'économie et a la bourse,j'ai été surprise que cette grande maison soit independante!!!
En ce qui me concerne j'aime beaucoup Longchamp,et je trouve effectivement que depuis quelques années.enfin surtout depuis l'arrivée de kate moss),leur image a changée,les prix ont fortement augmentés,les sacs sont plus originaux ils"osent"sortir de l'image classique de la ligne Roseau...
En tout cas,j'ai plusieurs sacs de chez eux et je n'ai jamais été decue...