Défilé CélineDéfilé CélineDéfilé Céline

Céline, ballerines et attente recalibrée

Éternelle admiratrice des créations de Paul Poiret, des drapés de Vionnet ou encore des excentricités mélancoliques de McQueen, je suis longtemps restée dubitative devant la grammaire stylistique d'Hedi Slimane. Pendant des années, j'ai ainsi cherché en vain dans les défilés du créateur ce qui lui valait d'être adulé par la fashion sphère. Jusqu'au jour où je compris que je n'avais en réalité pas la bonne grille de lecture...
Défilé Céline
J'analysais en effet les défilés Saint Laurent ou Céline comme des défilés Dries Van Noten ou Haider Ackermann. Or, ces derniers avaient beau être présentés pendant la même fashion week, ils n'en étaient pas moins fondamentalement différents. 

En les plaçant dans la même catégorie, je me condamnais à être constamment déçue et à passer à côté des potentielles qualités du travail de Slimane. J'agissais comme si un macaron Paul devait être jugé à l'aune de ses homologues signés Pierre Hermé. Or, s'il n'atteint pas le degré de subtilité de ceux du chef pâtissier, ledit macaron n'en demeure pas moins une douceur sucrée agréable et facile d'accès, réjouissant de manière éphémère aussi bien le moral que les papilles. De même, il ne me serait pas venu à l'esprit de comparer un tableau de Pollock à une oeuvre de Rembrandt… 

Bref, il me fallait cesser de considérer Slimane comme un couturier, un coloriste éclairé ou un virtuose des volumes et commencer à le voir pour ce qu'il est vraiment, à savoir un photographe fasciné par la jeunesse, un styliste captant l'air du temps à la perfection, un créateur de silhouettes immédiatement désirables, un réhausseur de basiques, un as du marketing… 

Cela me prit quelques mois, mais je parvins finalement à ne plus aborder les collections Céline avec une rancoeur larvée, nourrie des déceptions passées, mais plutôt avec une excitation joyeuse : j'avais désormais hâte de découvrir les mix and match de saison appelés à dynamiser les looks du quotidien, mais aussi les nouveaux dress codes susceptibles de booster marinières et autres pièces classiques. 
Défilé Céline
C'est ainsi avec gourmandise que j'ouvris récemment l'onglet "Runways" de Vogue.com afin de visionner le nouvel opus Céline. Et je ne fus pas déçue. En imaginant la génération Z s'emparer des classiques Céline, Slimane fait des infidélités aux seventies et offre une nouvelle dynamique au vestiaire de la griffe. Et si l'usage du top cropped semble ici un brin trop littéral, force est néanmoins de constater que bon nombre de silhouettes, mix and match et autres classiques revisités donnent envie d'être adoptés sur le champ.
 
On retiendra ainsi que :
L'élaboration d'un total look noir à base de jean mom 7/8, d'une paire de chelsea boots dans l'air du temps et d'une veste en cuir sans col est une fort bonne idée (voir ici).
Portée avec un jean boyfriend destroyed et une blouse rayée, la ballerine retrouve un réel fashion appeal (voir ici).
La veste en tweed façon Chanel pourrait bien être la meilleure alliée du duo jean flare/baskets (voir ici).
Les imprimés classiques gagnent à se voir twistés à coups de boots unisexe et de pièces à sequins (voir ici).
Les robes midi fluides apprécient la compagnie d'une veste sportswear (voir ici et ).
Le rouge ciré se marie fort bien aux imprimés marron/caramel (voir ici).
Les Palladium injectent une heureuse dimension root aux looks preppy (voir ici).
Les robes "glitter" se patinent au contact d'un gilet douillet (voir ici et ).
La veste en cuir sans col ringardise le perfecto (voir ici).
Défilé Céline
On note par ailleurs que l'avantage avec le style Slimane, c'est qu'aucun achat n'est généralement nécessaire pour l'appliquer à son dressing. On a en effet toutes une paire de ballerines oubliée au fond d'un placard, une casquette ramenée d'un voyage aux USA, que notre mari/père/frère ne met plus, , une robe de demoiselle d'honneur jamais reportée...
Par Lise Huret, le 03 novembre 2020
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18 commentaires
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Noremma2009Il y a 3 ans
Oui ok , c'est un bon styliste qui utilise (parfois) différemment des pièces déjà existantes. (mais qui s'inspire aussi beaucoup de silhouettes vues sur instagram)
Mais sans la création, qu'est-ce qui peut justifier les prix de la marque ? Et même l'achat dans cette marque ?
Comme tu le dis, on a déjà tout ou on peut tout trouver facilement.
il pourrait se contenter de créer des lookbooks, des carnets d'inspiration !!!
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Lise (TDM)Il y a 3 ans
Ah les prix ... Il y a un marché, les marques auraient donc tort de se priver ;)
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EliseIl y a 3 ans
Je suis d'accord (comme très souvent !) avec ton analyse et je pense qu'on peut même la pousser un peu plus loin.
C'est vrai, Slimane est avant tout un as du marketing et je vois en sa fascination (un peu dérangeante) pour la jeunesse, une stratégie de vente bien huilée.
En effet, à part quelques exceptions (héritières, filles de top modèles, influenceuses) peu de jeunes femmes ont réellement les moyens d'être des clientes Céline, dont le coeur de clientèle doit plutôt avoir 40-60 ans (mais je me trompe peut être !).
Ces vêtements faciles à s'approprier semblent alors parfaits pour ces acheteuses aisées qui ne doivent pas toujours avoir envie de se prendre la tête (une sorte de H&M pour bourgeois en quelques sortes).
Les mises en scène très "érotico-juvénile-rock-défoncé" dont Slimane a le secret, donnent à la marque un petit côté sulfureux qui ne doit pas déplaire à cette clientèle, qui peut ainsi s'offrir un souffle de jeunesse (complètement fantasmée et idéalisée) à travers un sac griffé (qui eux restent très classiques en fin de compte).
De ce fait, je vois plus dans sa démarche une stratégie pour appâter les acheteuses, en imitant les codes des jeunes ou en remasterisant des classiques de leur enfance,
qu'une réelle volonté de création. Bref, c'est un bon vendeur.
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EmmaIl y a 3 ans
Très bien vu !
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Jeanne Il y a 3 ans
Je suis complètement d’accord avec Elise et Noremma. On a le sentiment que seul le nom de Slimane provoque une vraie machine à cash !!! C’est un peu cynique tout de même. Que retiendrons nous des défilés dans quelques années ? Rien sans doute, ce n’est que mon avis. Une très bonne styliste de presse pourrait faire le job, avec sûrement plus de créativité. Mais les financiers sont plus que jamais aux manettes.
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CarolineIl y a 3 ans
Pour moi, Slimane, ce serait du Zara hyper édité et mieux produits. En vrai, je trouve que ça marche bien et je n'ai pas besoin d'acheter de nouvelles pièces pour m'en inspirer. C'est tout bénef.
Et pendant ce temps-là, je continue à acheter du Céline par Phoebe Philo sur Vinted...
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SpunkyIl y a 3 ans
Je te conseille de visiter le site resee.com, ils ont beaucoup d’articles Celine par Phoebe Philo.
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CarolineIl y a 3 ans
Eh he, bien vu, merci!
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HelleIl y a 3 ans
C'est soit un as du marketing, soit il est entouré par des as du marketing. Ce que je trouve intéressant, c'est cette espèce de rancoeur pseudo-féministe autour du passage de Phoebe Philo ("des habits faits par une femme, pour les femmes") à Slimane (objectificateur des femmes).

Premièrement, c'est vrai que Phoebe Philo c'était un peu autre chose point de vue créativité et beauté, mais le côté "par les femmes, pour les femmes", on repassera, vu le budget - après, sur Vinted, ça s'aborde.

Et deuxièmement, ce que je vois là de la part de Slimane, point de vue sexytude et objectification, avec l'image qu'on lui attribue d'avoir volé la place à une femme: je dirais presque que c'est du normcore. Même le jeans destroy l'est très poliment et proprement. Alors c'est joli, mais j'ai du mal à voir son utilité en tant que créateur, sauf à dire que c'est spécial parce que c'est lui.
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EliseIl y a 3 ans
Pour moi la rancoeur que Slimane a cristallisé en arrivant chez Céline n'émane pas d'une problématique féministe (je trouve le terme "pseudo-féministe" inapproprié) mais plutôt de sa propension (il a fait la même chose chez YSL) à s'emparer de la maison sans respect pour l'héritage laissé par ses anciens directeurs artistiques.
Il fait du Slimane chez YSL, du Slimane chez Céline et impose en effet son univers lisse, quasi normcore comme tu dis, partout où il passe.
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HelleIl y a 3 ans
La revendication a été formulée de manière féministe dans pas mal de médias anglo-saxons, et je pense qu'elle l'est sincèrement dans pas mal des cas pour les gens qui s'expriment. J'ai dit "pseudo" parce que je pense que quelqu'un au niveau du marketing a pris la température de l'air du temps, plus ou moins.

Après pour ce qu'inspire Slimane lui-même, je pense que ce que tu décris est plus proche de la déception qu'il inspire réellement. Sous Phoebe Philo, Céline, c'était réellement inspirant, alors que lui, ce qu'il suscite c'est d'éternels débats un peu chaméléon qui prennent la forme de ce qui les entoure. Et oui c'est assez agaçant qu'il fasse couler autant d'encre en pissant la même mixture normcore sur chaque poteau.

C'est peut-être aussi que chaque créateur essaie de préserver plutôt sa marque personnelle que celle de chaque maison où il passe, car le phénomène n'est pas limité à lui, c'est simplement que Demna Gvasalia est juste un chouïa moins normcore, pour citer un seul exemple, donc y a moins cette impression de tuer la créativité sur son passage.
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EliseIl y a 3 ans
je n'aimais vraiment pas Demna chez Vetements et encore moins chez Balenciaga, mais je dois avouer qu'à force de scruter ses défilés (et en faisant omission des ses affreux gimmick ultra provoc et commerciaux) je suis finalement touchée par plusieurs de ses créations.
Comme le dit Lise pour Slimane, j'ai peut être changé ma grille de lecture !
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HelleIl y a 3 ans
Bah, avec Gvasalia on voit tout de suite ce qu'il aime et ce qui est important pour lui en regardant ses créations. Avec Slimane j'ai un peu de mal, même s'il fait toujours la même chose.

J'ai aussi une prédilection, parfois, pour les exercices de stylisme qui font "ouille les yeux" de premier abord. Avec Slimane j'ai l'impression parfois que mes yeux se font doucement et gentiment masser par un groupe de dames bien comme il faut. Ce qui, sans aucun kinkshaming, n'est pas vraiment ma préférence.
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nuiIl y a 3 ans
La comparaison avec un macaron "Paul" est bien trouvée.
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flosolIl y a 3 ans
Sauf que le macaron Paul est vendu à un prix raisonnable et ne se prend pas pour du Hermé.. Je n'ai jamais compris l'engouement pour Slimane et les photos du dernier défilé Céline me confortent dans mon opinion. Mais quel ennui !
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nuiIl y a 3 ans
On est d'accord.
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anjeIl y a 3 ans
je trouve que ça ressemble à la mode normcore qu’on voit dans les lycées. Filles et garçons ont les mêmes codes (et ça n ‘est peut être pas un mal ..)La féminité s’exprime par toutes petites touches, un col rond, une taille haute ; et elle s’assume rarement sans second degré : une robe romantique oui mais dans des couleurs indigentes et avec des boots militaires. C’est peut être ça que nous raconte la mode de S., la fin d'une mode genrée ...?
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MilaIl y a 3 ans
Je ne peux pas argumenter comme vous toutes : je ne connais pas ce monde de la mode ni ces têtes d'affiche. Mais lorsque je regarde ce que fait h.Slimane j'ai envie de dire : mais il a copié ma voisine, ma collègue, les lycéens ou... moi-même. Alors j'aime bien, mais je suis pas waaaouh c'est Slimane !
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